Affiche Still LifeStill Life de Jia Zhangke

 

Je ne connais rien au cinéma chinois, je n’ai même jamais vu de Wong Kar Wai, c’est dire. C’est un peu la curiosité qui m’a poussé dans la salle, la curiosité pour un pays un peu mystérieux, traditionnellement replié sur lui-même depuis des millénaires et que donc, en tant qu’européen je suis fait un plaisir d’auto-mystifier. Le pays de la démesure, le pays de l’homme fourmi.

Avec ce film, je savais que j’allais plonger dedans en me débarrassant de quelques petits préconçus au passage.

 

 

C’est l’histoire de deux êtres différents (un homme pauvre, une femme appartenant à la nouvelle classe moyenne) à la recherche de leur moitié, de leur passé. Ils débarquent dans un monde mourant, à demi englouti par les eaux que retient le barrage des trois gorges. Deux déracinés qui cherchent leurs repères dans un environnement en perpétuelle agonie, des barres d’immeubles en ruines, les structures d’usines désaffectées. Il y fait chaud, il y fait moite. La pollution et la poussière rend les paysages opaques.

Qu’est ce qui les pousse dans cet enfer ?  Still life est peut-être un film sur le sacrifice, d’un homme à l’amour des siens, d’une société au progrès. Il ne faut pas y chercher de morale, juste s’y attarder comme le fait la caméra sur les détails, sur les objets. Finalement, les véritables héros de l’œuvre sont peut-être les choses inanimées et les ruines. Les personnages eux,  ne sont que des figures fantomatiques, déracinées, ballotées par les mutations de la Chine moderne.

 

 

Il faut aller voir Still life pour les deux acteurs principaux qui jouent admirablement bien : ils sont touchants dans leur obstination et leur fragilité. L’émotion passe au travers des visages, des silences, avec une pudeur toute asiatique. Le contraste entre la beauté timide des personnages et la laideur du monde qui les entoure n’en est que plus frappant.

Au final, c’est un film que j’ai profondément aimé. Il renverse un peu nos façons occidentales de voir le monde. Il a en tout cas le mérite de monter « autre chose » : ce que l’individualisme a effacé chez nous, ce qu’il fait naître en Chine, pour le meilleur et pour le pire.

 

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